Le Canada et les États-Unis se dépêchent de renégocier l’Accord des Grands Lacs

 

Le court échéancier risque de réprimer l’engagement du public et de compromettre l’Accord final

Jan 28 2010

Pendant que les États-Unis et le Canada s’engagent à modifier un nouvel Accord relatif à la qualité de l’eau des Grands Lacs, des organismes de conservation environnementale leur signalent que leur échéancier ne permet pas de consulter le public convenablement, et que cette lacune pourrait sérieusement compromettre l’exécution de l’Accord final et perturber ensuite la qualité des Grands Lacs.

« En mars 2006, les deux gouvernements se sont consultés pour la première fois pour délibérer au sujet de l’Accord. Puis, ils ont annoncé leur intention de renégocier seulement en juin dernier et, depuis huit mois, ils n’ont rien entrepris. Maintenant, ils veulent finaliser ce processus avant la fin de l’année », déclare John Jackson, directeur Production Propre et Toxics de l’Union St-Laurent Grands Lacs. Et d’ajouter, « Je regrette, mais ce n’est pas du tout une bonne gérance environnementale ».

Plus tôt cette semaine, trente-quatre organismes ont exprimé leur mécontentement en adressant une lettre aux gouvernements. Cette dernière représente une réponse à la suite d’une présentation par téléconférence qui a été donnée par Environnement Canada et U.S. EPA, plus tôt ce mois-ci. À ce moment-là, les agences gouvernementales ont révélé leur processus de renégociation. À l’heure actuelle, elles demandent au public de donner leurs commentaires sur la question de la gérance jusqu’au 14 février – exactement un mois avant l’annonce. Les deux gouvernements n’ont pas révélé le mode de déroulement des prochaines périodes de consultations publiques.

« En condensant les échéanciers et en posant des questions générales, sans limite de durée, ces procédés gouvernementaux ne permettent pas de donner des commentaires approfondis et significatifs sur les modalités d’un nouvel Accord », a précisé Jane Elder, qui a agi en tant que citoyen observateur lors de la renégociation de l’Accord en 1987. « Les gouvernements doivent fournir un cadre et un échéancier qui permettront au public de participer pleinement aux pourparlers en ce qui concerne le contenu et le processus de l’Accord, et “cliquer et envoyer” ne suffit pas, ajoute-t-elle ».

« Nous savons que nous n’aurons pas de document à commenter ni de questions à répondre au sujet des problèmes complexes de la gérance avant l’échéance de la période de consultations. Pourtant, les résolutions de la gérance sont au cœur des prochaines prises de mesures efficaces afin de relever les défis croissants ayant un impact sur l’écosystème des Grands Lacs », a affirmé Sarah Miller, chercheuse sur les politiques de l’eau à l’Association canadienne du droit de l’environnement.

« Les gouvernements agissent rapidement, et même si leur empressement est apprécié, la planification de leur court échéancier compromet l’habileté du public d’améliorer le projet final », affirme Marc Smith, Policy Manager de la National Wildlife Federation. Et d’ajouter, « La qualité à long terme de nos majestueux Grands Lacs est une raison suffisante pour s’assurer qu’il y ait assez de temps pour bien l’exécuter ».

« En ce qui concerne les communautés de citoyens et de défenseurs intéressés, les consultations publiques représentent le meilleur moyen pour exprimer leurs opinions sur les processus gouvernementaux. Lorsque ces consultations sont écourtées, les principes de notre démocratie elle-même sont entachés », explique Grenetta Thomassey, Policy Director au Tip of the Mitt Watershed Council.

Les organismes environnementaux, qui comprennent les conseillers gouvernementaux officiels, suggèrent six recommandations pour améliorer le processus :

1. Soumettre une version préliminaire des stratégies gouvernementales ou un document de réflexions sur les questions de la gérance environnementale.

2. Une période de consultation publique de 60 jours doit être définie dans la version préliminaire des stratégies gouvernementales ou dans le document de réflexions.

3. À la suite des négociations des deux gouvernements sur la version préliminaire du langage conventionnel de la gérance, ils devraient la resoumettre à une période de consultation publique.

4. En ce qui concerne les « problèmes » de consultations, suivre le même processus de recommandations indiqué aux numéros 1, 2 et 3, en soumettant une version préliminaire des stratégies gouvernementales ou un document de réflexions suivie d’une période de consultation publique de 60 jours, ainsi qu’une autre possibilité de donner des commentaires après la première ronde de négociations des gouvernements sur le sujet.

5. Publier sur le web le résumé des observations reçues et les commentaires formulés par le public provenant de chacune des étapes de la consultation.

6. Soumettre la révision finale de l’Accord relatif à la qualité de l’eau des Grands Lacs afin d’obtenir des commentaires avant la conclusion des négociations et des audiences publiques tenues dans les deux pays au sujet de ce projet.

L’Accord relatif à la qualité de l’eau des Grands Lacs a été signé pour la première fois par le Premier ministre Trudeau et le Président Nixon en 1972. Ensuite, il a été modifié en 1978 et pour la dernière fois en 1987. L’Accord exprime l’engagement de ces deux pays à maintenir la qualité de l’écosystème du bassin des Grands Lacs en interdisant la décharge de grande quantité de substances toxiques polluantes, et en éliminant pratiquement toutes les substances toxiques dangereuses et persistantes.

L’Accord a été le catalyseur de grandes initiatives pour nettoyer et protéger les Grands Lacs. Par exemple, au début des années 1970, la profusion des nutriments des eaux usées et du ruissellement agricole ont provoqué une importante prolifération des algues qui qui étouffaient littéralement le lac Érié et causé des dommages considérables aux autres Grands Lacs. L’Accord a permis de déployer des efforts afin d’identifier les causes du problème, de recommander de meilleures solutions et d’établir des relations entre les scientifiques, les régulateurs et les groupes de citoyens des deux côtés de la frontière. Le résultat a mené à la promulgation de nouvelles lois et de nouveaux règlements et à la modernisation du traitement des eaux usées. Grâce à ces efforts, le Lac Érié et le bassin des Grands Lacs, qui étaient au bord de l’abîme écologique, ont été nettoyés. De plus, les stratégies utilisées ont fonctionné dans d’autres systèmes d’eau douce dans les deux pays et dans le monde.

Lire la lettre [1] (en anglais seulement)

-30-

Personnes ressources :

John Jackson, directeur Production Propre et Toxics de l’Union St-Laurent Grands Lacs, 519-744-7503, cellulaire : 519-591-7503, jjackson@glu.org
Jane Elder, 608-255-2087, jane@janeelderstrategies.com
Sarah Miller, Water Policy Researcher, Association canadienne du droit de l’environnement, MillerS@lao.on.ca
Marc Smith, Policy Manager, National Wildlife Federation, 734-255-5413, msmith@nwf.org
Grenetta Thomassey, Policy Director, Tip of the Mitt Watershed Council, 231-347-1181 ext. 118, grenetta@watershedcouncil.org