Des citoyens demandent au vérificateur général d’enquêter sur les origines du plan de créer un monticule géant de déchets radioactifs sur les berges de la rivière des Outaouais

https://www.cela.ca/node/3533

 

Juin 26 2017

(Ottawa) Une pétition s’adressant à Julie Gelfand, commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada, déposée le 20 juin auprès du Bureau du vérificateur général, sollicite son aide pour obtenir de l’information sur les origines de la proposition de dépotoir de déchets radioactifs. Ce projet suscite l’inquiétude de groupes de citoyens, de propriétaires d’entreprise et d’habitants du Québec et de l’Ontario, depuis la publication de son énoncé des incidences environnementales en mars 2017.

Selon des opposants au projet, la décharge de déchets radioactifs proposée, nommée « installation de gestion des déchets près de la surface », fait l’objet d’un processus accéléré d’approbation en dépit du fait qu’elle ne satisfait pas aux normes de sécurité qu’a établies l’Agence internationale de l’énergie atomique. Parmi les critiques du plan, on retrouve un certain nombre de scientifiques à la retraite qui travaillaient pour Énergie atomique du Canada limitée (EACL).

Un ancien directeur du génie de la sécurité et de l’homologation au sein d’EACL fait remarquer que les éléments du projet qui posent problème sont son emplacement inadapté à proximité d’un marais qui s’écoule dans la rivière des Outaouais et sa technologie inadéquate. D’autres scientifiques soulignent que des matériaux, comme le plutonium, qui seront radioactifs pendant plus de 100 000 ans seraient stockés dans l’installation. Après une période de contrôle institutionnel, les déchets seraient abandonnés et le monticule se dégraderait, laissant fuir des contaminants dans l’environnement et la rivière des Outaouais, pour ainsi dire pendant l’éternité.

Des groupes de citoyens veulent savoir comment une proposition aussi boiteuse a pu émerger après que le gouvernement fédéral avait dépensé 1,15 milliard de dollars sur un programme de nettoyage de ses déchets radioactifs « historiques », entre 2006 et 2015. On avait alors estiméque 10 milliards de dollars seraient nécessaires pour nettoyer les déchets radioactifs historiques, dont les zones de déchets contaminés, les immeubles et le plutonium qui subsiste en raison du rôle qu’a joué le Canada dans la production d’armes nucléaires durant la guerre froide. L’entrée en fonction de l’installation de stockage était prévue pour l’année 2035, ce qui reflète le processus laborieux requis pour caractériser les déchets, sélectionner les technologies appropriées, choisir un site et homologuer une installation environnementalement acceptable.

Johanna Echlin, membre de l’association de propriétaires de chalets du Vieux fort William, fait remarquer qu’une volte-face abrupte est survenue lorsque le gouvernement conservateur a privatisé les installations nucléaires du Canada, a mis sur pied les Laboratoires Nucléaires Canadiens et a accordé un contrat de 6 ans à un consortium multinational du secteur privé pour gérer l’installation de stockage et de gestion de déchets radioactifs de propriété canadienne en septembre 2015.

« Nous sommes très inquiets car, à notre avis, le contrat négocié avec SNC Lavalin et d’autres entreprises met l’accent sur le stockage à faible coût de tous les déchets et sur l’exploitation de l’installation dans les 6 ans qui suivent le début du projet, a fait remarquer Johana Echlin. Il semblerait que le consortium pourrait avoir remporté la soumission de gérer les Laboratoires Nucléaires Canadiens en proposant une approche à la va-vite de gestion des déchets nucléaires du Canada, qui fait passer les coûts du « nettoyage » de 10 milliards à 600 millions de dollars. Nous voulons savoir qui a dit qu’il était acceptable de faire fi de la valeur que procureraient plus de 1 milliard de dollars de travail par rapport au plan de nettoyage précédent. »

Johana Echlin conteste la décision du gouvernement conservateur de privatiser EACL. À son avis, les groupes de citoyens la voient comme une abdication de la responsabilité du gouvernement du Canada de gérer correctement ses déchets radioactifs.

Selon Ole Hendrickson, chercheur pour Citoyens concernés du comté et de la région de Renfrew, « il semble que les dépenses annuelles d’EACL ont plus que doublé et ont atteint plus de 1 milliard de dollars après la privatisation. Nous demandons au ministre des Ressources naturelles de justifier cette hausse ».

La pétition adressée à la commissaire de l’environnement a été cosignée par le groupe Citoyens concernés du comté et de la région de Renfrew et l’Association canadienne du droit de l’environnement.

Theresa McClenaghan, directrice générale et conseillère juridique de l’Association canadienne du droit de l’environnement, souligne que la pétition vise à s’assurer que le financement a été correctement affecté à la réduction sécuritaire et efficace des risques pour les Canadiens. Selon elle, « si l’installation proposée ne satisfait pas aux exigences réglementaires relatives à la santé, à la sécurité et à la protection de l’environnement, beaucoup d’argent, de temps et d’efforts auront été gaspillés dans une tentative malavisée du gouvernement du Canada de se libérer plus rapidement de ses responsabilités en matière de déchets nucléaires historiques ».

La pétition présente une série de 15 questions adressées à James Carr, ministre des Ressources naturelles du Canada, qui doit y répondre dans les 60 jours qui suivent leur réception du Bureau du vérificateur général.

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Personnes-ressources :
Ole Hendrickson, chercheur, Citoyens concernés du comté et de la région de Renfrew613 234-0578
Theresa McClenaghan, directrice générale et conseillère juridique, Association canadienne du droit de l’environnement 416 662-8341

PÉTITION adressée à la commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada (anglais seulement) – Responsabilités du Canada en matière de déchets nucléaires historiques : frais de nettoyage des Laboratoires de Chalk River (Canada Nuclear Legacy Liabilities: Clean-up Costs for the Chalk River Laboratories), de l’Association canadienne du droit de l’environnement et du groupe Citoyens concernés du comté et de la région de Renfrew

Fiches d’information
Dix choses que les Canadiens doivent savoir au sujet de l’installation de gestion de déchets radioactifs de Chalk River

Dix autres choses que les Canadiens doivent savoir au sujet de « l’installation de gestion des déchets près de la surface » de Chalk River

Commentaires du public sur le projet proposé de l’installation de gestion des déchets près de la surface (site Web de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale)

Autres articles d’intérêt :
JR Walker, ancien directeur du génie de la sécurité et de l’homologation au sein d’EACL, Document no 40

William Turner, ancien coordonnateur de l’évaluation environnementale au sein d’EACL, Document no 97

Extraits du contrat entre les Laboratoires Nucléaires Canadiens et le gouvernement du Canada

Extraits de l’énoncé des incidences environnementales – intention d’éliminer TOUS les déchets contenus dans le monticule